samedi 3 octobre 2009

Il pleut sur Salerne




Il pleut et il brume sur Salerne. Des gouttes fines et régulières. On a un ciel de mer du Nord : si bas qu’on y perdrait un canal. Déjà, on distingue à peine le château médiéval accroché là-haut sur la colline. Comme si l’hiver commençait, par surprise. Gilbert s’attend à avoir froid sur l’Atlantique. « Aux Philippines, le seul endroit où il y a de la neige, c’est dans le frigidaire ! » Il veut nous dire plein de choses, qu’il nous aime bien, qu’on va lui manquer, qu’on est des « good listeners »… Il a encore plusieurs mois à tirer sur le Gran Bretagna.

Avec d’autres passagers, avec pas mal d’autres matelots aussi.

Car on n’est pas les seules à quitter le navire. Le capitaine Francesco de Rosa attend une nouvelle affectation ou quelques jours de répit. Il ne sait pas trop. Antonio, le second mate, finit sa valise. Direction Palermo. Franco jubile à l’idée de retrouver sa « signora » sur les pentes du Vesuvio. D’autres visages sur lesquels je n’arrive pas à mettre de noms ont le sourire jusqu’aux oreilles. La quille, pour un mois, deux mois, peut-être trois.

On a bougé, on bouge lentement. Rien ne sert de courir, la terre est si proche. Sur les quais, d’autres conteneurs empilés - Hapag-Lloyd, Hamburg Süd, Maersk… - attendent d’être saisis par les grues. On les retrouvera sur les routes, portés par des camions. On attendra l’occasion de les doubler. Bloqués, on pestera contre ces poids-lourds qui nous ralentissent et nous gâchent le paysage. On les klaxonera même des fois. On oubliera que ces conteneurs lourdauds ont d’autres choses à offrir que des poupées Barbie qui font du vélo, des surgelés ou des habits made in China. On oubliera que ces conteneurs font des promesses, des promesses de voyage à ceux et celles qui ne sont pas pressés.


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